Au cours de cet épisode, nous allons nous focaliser sur une société pionnière du jeu vidéo en France. Ayant débuté dans les années 80, elle a été l'une des premières à croire en ce média qu'est le jeu vidéo. Plus qu'une simple histoire d'entreprise, Lankhor est une histoire d'amitié touchante et passionnante. À la toute fin, nous aurons l'occasion de découvrir les aventures de Jean-Luc Langlois, fondateur du studio. Il n'est pas particulièrement à l'aise avec cet exercice, et ce n'est pas non plus quelque chose qu'il aime forcément faire. C'est donc avec un grand honneur que nous l'accueillons dans la chronique Rest In Play pour lire son parcours.

La création du studio

C'est en Île-de-France, dans le département des Yvelines, plus précisément à Voisins-le-Bretonneux, que Lankhor voit le jour. Cette aventure est le fruit d'une collaboration entre Jean-Luc Langlois, sa sœur Béatrice et Bruno Gourier

À l'origine, Jean-Luc et Béatrice travaillaient tous les deux comme développeurs pour l'éditeur Pyramide. Tout comme Bruno Gourier, c'est là qu'ils ont fait connaissance. Pendant cette période, ils travaillent sur le jeu Wanderer, et Pyramide va alors intervenir dans l'œuvre sans les consulter.

Wanderer

Cette façon de faire déplaît fortement à Jean-Luc et Béatrice, qui décident de voler de leurs propres ailes. Bruno Gourier avait sa propre entreprise, Kyilkhor Création. Jean-Luc et Béatrice Langlois avaient la leur. Ils prennent donc la décision de fusionner pour devenir Lankhor, une contraction entre Langlois et Kyilkhor. Cela se passe en 1987.

Si Wanderer fut une mauvaise expérience du côté de l'édition, cela n'entame pas la détermination de Lankhor. Ils décident de s'auto-éditer, ce qu'ils feront d'ailleurs avec leur deuxième titre, Le Manoir de Mortevielle. L'entreprise opte donc pour l'indépendance, une décision logique compte tenu de leur amour de la liberté.

Le Manoir de Mortevielle

Les trois fondateurs de Lankhor.
Bruno Gourier à gauche, Béatrice Langlois au milieu et Jean-Luc Langlois à droite.

Lankhor ne se refuse rien, que ce soit en termes de genres de jeux ou de supports sur lesquels ils publient. Tant qu'ils peuvent produire des œuvres de qualité et réaliser leurs ambitions.

L’apogée du studio

Il est difficile de parler de l'apogée dans ce cas de figure si particulier. En effet, nous parlons d'une entreprise pionnière du jeu vidéo en France, opérant véritablement aux prémices de cet art naissant. À l'époque, le secteur demeurait très confidentiel, loin d'être aussi grand public qu'aujourd'hui.

Il est donc compliqué d'honorer cette partie comme j'ai l'habitude de le faire. Lankhor comptait jusqu'à 25 employés au maximum, ce qui était déjà considérable pour l'époque, d'autant plus que de nombreux jeux étaient développés par une ou trois personnes seulement.

Cependant, l'apogée du studio réside dans sa capacité à produire de nombreux titres de grande qualité au fil des ans. Ces jeux, en plus de se vendre convenablement, étaient de véritables prouesses techniques. On pense notamment à Maupiti Island, La Crypte des Maudits, Vroom et bien d'autres.

Photo de l'équipe de Lankhor, prise à l'époque.

Ces créations ont remporté de nombreuses distinctions, notamment des Tilt d'or, entre autres. Lankhor a réalisé et édité environ 40 jeux au cours de son existence.

La fin du studio

Malheureusement, 1993 marque le début des difficultés pour la société. Après la sortie du jeu Black Sect, un véritable échec, Lankhor a rencontré de sérieux problèmes financiers, effaçant ainsi tous les bénéfices qu'ils avaient accumulés grâce au succès de leur jeu Vroom.

C'est donc avec douleur que l'entreprise a dû mettre fin à plusieurs jeux en développement afin de trouver une solution viable. Quelques membres importants, comme Bruno Gourier, ont décidé de quitter Lankhor l'année suivante, en 1994.

Néanmoins, en 1997, Lankhor va de nouveau développer des jeux, cette fois pour le compte d'Eidos Interactive, la célèbre société britannique. Cette collaboration a duré trois ans avant que Lankhor ne décide de partir vers d'autres horizons, insatisfait de cette coopération. Ils ont toutefois pu créer deux jeux de Formule 1 avec l'éditeur londonien.

Suite à ça, ils décident de voir du côté de Cryo Interactive et là encore, ça ne prendra pas entre les deux parties pour différentes causes. Jean-Luc Langlois y reviendra avec nous lors de notre échange.

Ils finiront par collaborer avec l'entreprise française Microids au début de l'année 2000. Avec eux, ils sortiront deux jeux, cependant, Microids a eu tendance à limiter la liberté de Lankhor et à refuser presque tous les projets proposés. Lankhor a donc décidé de rompre ce partenariat.

Malheureusement, en 2001, c'est le coup de grâce. Alors qu'ils pensaient décrocher un contrat majeur avec une société japonaise, Video System, cela ne s'est pas concrétisé. Lankhor est alors plongé dans une situation désastreuse et impossible à redresser. Leur effectif est passé de 25 à 8 employés, et ils ont dû malheureusement fermer leurs portes en décembre 2001.

Il est à noter que Video System, l'entreprise japonaise qui a contribué à cette situation, a également fermé ses portes la même année.

C'est une période abominable, où de nombreux studios français ont fait faillite. Lankhor n'a pas été la seule victime de cette hécatombe. Néanmoins, ce qu'il faut retenir de ce studio, c'est son amour du jeu vidéo, son attachement à l'indépendance et à la liberté. Jean-Luc Langlois et ses compères sont toujours restés fidèles à eux-mêmes et ont toujours pris les décisions qu'ils estimaient juste. Vous pourrez d'ailleurs découvrir davantage lors de notre long entretien avec Jean-Luc.

En 2023, certains membres de l'équipe se sont réunis à nouveau.

Entretien avec Jean-Luc Langlois (fondateur et PDG)

Comment avez-vous découvert le jeu vidéo et comment avez-vous su que vous vouliez en faire votre métier ?

J'ai eu mes premières expériences avec les jeux vidéo grâce à de petites consoles, comme celles avec des jeux de type Pong, et des choses de ce genre. C'est ainsi que j'ai découvert le monde des jeux vidéo.

À ce moment-là, j'ai acheté un Texas Instruments grâce auquel j'ai commencé à programmer en langage BASIC. J'ai créé quelques petits jeux de cette manière. Mes connaissances étaient assez limitées à l'époque, mais j'ai appris au fur et à mesure.

Tout cela s'est produit presque par hasard. Après mon service militaire, j'ai suivi une formation d'analyste programmeur qui a duré environ trois mois. À l'époque, il y avait une grande demande pour des professionnels de l'informatique, donc de nombreuses formations étaient proposées, y compris à Toulon. J'ai suivi cette formation, mais à l'époque, ma véritable passion était la musique. J'avais même arrêté mes études avant le baccalauréat, car je consacrais beaucoup de temps à la musique, et j’aspirais à en faire ma carrière.

À cette époque, les synthétiseurs commençaient à se développer, le standard MIDI faisait son apparition. Cependant, les outils étaient encore limités à l'époque. Ce qui m'intéressait vraiment, c'était de travailler dans le domaine du développement, de créer des outils d'apprentissage musicaux, et autres. Cependant, comme c'était encore trop tôt pour réaliser ce rêve, je me suis dit : "En attendant, je vais me lancer dans la création de jeux."

Finalement, je suis resté dans l'industrie du jeu vidéo. J'ai été complètement captivé par cet univers. En parallèle, j'ai commencé par créer les musiques pour mes jeux, ainsi que les logiciels liés à la musique. À chaque jeu que nous avons sorti, c'est moi qui ai conçu les logiciels, que ce soit pour la synthèse sonore, l'échantillonnage, etc. Cela a créé un lien entre mes deux passions.

Comment est né Lankhor ?

C'est avec ma sœur Béatrice Langlois que tout a commencé. À l'époque, nous n'avions pas beaucoup d'argent. Nous ne pouvions acheter qu'un seul Sinclair QL, et c'est elle qui avait réussi à rassembler un peu d'argent, un peu par hasard. Alors, nous partagions un seul ordinateur pour nous deux, car nous vivions dans la même maison, et elle était en couple avec le guitariste de mon groupe. C'est dans ce contexte que nous avons décidé de nous lancer dans la création de jeux avec notre unique Sinclair QL. Notre premier titre, Wanderer, est sorti en 1986.

À partir de là, nous avons décidé de créer une société en nom collectif (SNC), car nous n'avions pas les moyens d'ouvrir une SARL à l'époque, ce qui aurait nécessité des fonds que nous n'avions pas.

Nous avons démarré avec très peu de ressources, et au début, nous avons fait l'expérience désagréable de nous faire duper par l'éditeur Pyramide, qui a publié Wanderer. Ils nous ont causé des ennuis, mais en fin de compte, cela nous a rendu service, car cela nous a ouvert les yeux sur le fait que nous ne voulions plus jamais être dépendants d'un éditeur. C'est à ce moment-là que nous avons rencontré Bruno Gourier, avec qui nous avons fusionné nos deux sociétés, Kyilkhor et la nôtre, pour donner naissance à Lankhor.

Parmi tous les jeux développés au cours de l’existence de Lankhor, quel développement a été le plus marquant pour vous ? Et pourquoi ?

Pour moi, je pense que l'expérience la plus intéressante a été celle liée à Maupiti Island. Cette création a été particulièrement exigeante sur le plan technique, car nous souhaitions que le jeu fonctionne de manière fluide, que la souris réagisse à une fréquence d'au moins 20 Hz, entre autres défis techniques. Il y avait également un grand nombre de technologies en jeu, notamment pour gérer les ambiances, les animations, et plus encore. Du point de vue technique, ce projet a nécessité un énorme investissement, mais nous voulions que tout cela reste imperceptible pour les joueurs. Nous avons consacré énormément de temps à cette tâche.

Ce qui rend ce jeu particulièrement spécial, c'est qu'il était riche à tous les niveaux. Bruno et moi avons collaboré sur le scénario, en le créant ensemble, puis nous avons fait appel à quelqu'un d'autre pour rédiger l'intégralité des dialogues. Nous n'avons pas lésiné sur la complexité de l'histoire. Nous avions l'équivalent de près de deux heures de dialogues, ainsi qu'une quantité considérable de musique. C'était un véritable défi de réussir à faire tenir tout cela dans des disquettes. Il était essentiel que tout cela tienne dans une disquette double 720K.

L'objectif était clair : lorsque vous voulez donner la parole aux personnages, vous devez optimiser au maximum l'utilisation de l'espace. Cela nous a conduits à explorer diverses astuces et techniques pour réussir à raconter une histoire complexe dans un espace aussi restreint.

À cette époque, vous étiez quelques entreprises fleurissantes dans le jeu vidéo, en France. Comment se passait cette concurrence ? Communiquiez-vous avec les autres sociétés ou y avait-il une féroce compétition ? 

Eh bien, à l'époque, nous nous croisions régulièrement, car dès le début, nous avions reçu une récompense pour notre jeu Le Manoir de Mortevielle. Cela nous amenait à participer à différentes cérémonies organisées par des magazines tels que Tilt et d'autres, même du côté de Canal +. Grâce à ces événements, nous avions l'occasion de nous rencontrer plusieurs fois par an. Cependant, il n'y avait pas de mauvaise ambiance entre nous, car il faut dire que nous n'étions pas si nombreux à l'époque.

Ah si, nous avons rencontré des problèmes avec une personne en particulier, que je ne citerais pas. Nous avons eu des désaccords financiers avec lui. Quand nous avons fini le projet Le Manoir de Mortevielle, elle a créé un bundle un peu plus tard, dans lequel elle a inclus le jeu.

Elle a mis le jeu en vente sans nous en informer. Nous avons dû faire appel à un avocat pour arrêter les ventes. Ensuite, nous avons intenté un procès. Mais cette personne était plutôt maline. Elle avait ses propres avocats, qui ont réussi à discréditer notre avocate en invoquant des vices de forme. Étant donné que nous n'avions pas beaucoup de ressources financières, nous n'avons pas pu poursuivre l'affaire. C'est ainsi que cela s'est terminé.

Quels sont vos plus beaux souvenirs et anecdotes chez Lankhor ?

Ce que je retiens de Lankhor, c'est principalement la relation que j'avais avec les personnes avec qui j'ai travaillé. Je n'avais pas des collègues, j'avais des amis. Il y a eu plusieurs phases de Lankhor. Au tout début, il y avait une équipe plus intime, composée de ma sœur Béatrice, Bruno Gourier, Christian Droin, et Dominique Sablons, bien qu'il travaillait moins souvent dans les locaux. Nous étions moins proches de lui. Ensuite, Stéphane Polard nous a rejoints.

Au fond, il y a eu quelques personnes qui ont circulé ici et là, mais ces individus étaient les principaux acteurs de cette aventure. Notre équipe n'était pas très grande, mais c'était la première aventure qui a été la plus fructueuse, car avec cette équipe, nous avons remporté 13 prix. Nous avions toujours du retard dans la sortie de nos produits car nous étions très exigeants et manquions d'argent. Chaque jeu était systématiquement en retard de plusieurs semaines. Mais malgré cela, nous étions satisfaits de ce que nous avions accompli.

Ensuite, est venue la deuxième phase de Lankhor, qui a été un peu chaotique. À ce moment-là, Bruno est parti, tout comme Christian. Nous avons rebondi après le succès de Vroom et après avoir été approchés par deux marques, ce qui nous a ramenés vers le développement de jeux de course de Formule 1.

Durant cette période, notre équipe a considérablement grandi. Nous sommes passés à un effectif de 25 personnes, formant une équipe bien plus importante. C'est à ce moment-là que Daniel Macré a rejoint la société.

Ce que je retiens, c'est avant tout les relations chaleureuses qui existaient entre nous tous. Il pouvait y avoir des gens qui commençaient à travailler à 16h00 et restaient jusqu'à 2h00 du matin, il y avait toujours du monde. C'était une relation basée sur la confiance, car les gens n'en profitaient pas. Nous avons eu très peu de problèmes, seulement une ou deux personnes qui avaient du mal avec ce modèle de travail trop ouvert, qui avaient besoin de hiérarchie ou d'une structure plus formelle. C'étaient les seuls problèmes que nous avons rencontrés. Il y avait cette atmosphère de liberté et de confiance entre les membres de l'équipe, ce qui a fait de nous de véritables amis.

L'un de mes plus beaux souvenirs, cette fois avec Bruno Gourier, remonte aux débuts de Lankhor, lors de la sortie du jeu Le Manoir de Mortevielle. Le jeu a immédiatement rencontré un grand succès. À l'époque, les ventes étaient limitées, mais nous avons reçu une première commande de 3 000 unités. Pour nous, 3 000 unités étaient énormes, d'autant plus que nous avons assemblé les produits nous-mêmes dans notre salon. Il y a eu de très bons moments, de véritables aventures à vivre.

Quelles étaient les raisons de la fermeture de Lankhor ?

Nous avons rencontré des difficultés financières, car certaines personnes ne souhaitaient plus investir dans notre entreprise. C'est ainsi que nous nous sommes retrouvés dans cette situation délicate. De plus, nous avons connu une série d'infortunes, car lors d'un voyage au Japon, nous avions suscité l'intérêt de certains Japonais pour notre technologie liée à la Formule 1.

Lors de ce voyage, accompagné de Daniel Macré, nous avions conclu un accord avec eux. Ils avaient acheté notre technologie et nous avaient également passé une commande pour une adaptation liée à la F1. Ces deux aspects représentaient une opportunité financière considérable. Ils avaient donné leur accord, mais par la suite, il y a eu des hésitations, et malheureusement, l'affaire ne s'est pas concrétisée. Si cette opportunité avait abouti, je suis convaincu que Lankhor existerait encore aujourd'hui.

Cela aurait constitué un apport de fonds considérable, nous offrant une liberté totale. En d'autres termes, nous aurions eu les ressources financières pour décider de nos projets et de notre orientation de manière indépendante. Nous aurions pu exercer un contrôle total sur nos décisions, et je suis convaincu que nous aurions probablement relancé les séries mettant en scène Jérôme Lange - personnage de Maupiti Island et Le Manoir de Mortevielle - tout en continuant nos autres projets. Bien que ces projets se situaient dans des domaines différents, une indépendance financière nous aurait permis de les développer pleinement.

Peu de temps après cette période, quelque chose d'étrange s'est produit, affectant toute l'industrie. À l'époque, il me semble qu'environ 50 à 60 % des studios français ont fermé simultanément, ce qui était un chiffre considérable. Par la suite, d'autres ont connu le même sort au cours des deux années suivantes. En général, nous obtenions de l'argent au fur et à mesure de notre travail, grâce à des partenariats ou des contrats de développement, mais nous ne disposions pas de fonds à l'avance. Au moment où nous sommes allés au Japon, nous avions seulement environ trois mois de trésorerie.

Une fois l'accord conclu, nous avons commencé à travailler sur le projet, plutôt que de prospecter pour d'autres produits. Cependant, après deux ou trois mois, les choses n'avançaient pas comme prévu. Les choses traînaient, et il était évident que quelque chose ne tournait pas rond. Nous n'avons pas abandonné, mais notre situation financière devenait de plus en plus difficile. Nous avons dû réduire notre personnel en supprimant 10 ou 11 postes, une décision douloureuse car tous étaient des amis. Ils comprenaient notre situation, et certains ont décidé de partir.

À ce moment-là, nous avons dû élaborer rapidement un plan de sauvetage et vendre Lankhor. L'action devait être rapide, nous avons donc d'abord contacté Cryo Interactive. Ils étaient intéressés par l'obtention d'une licence Alain Prost, car ils étaient en contact avec lui et envisageaient de créer un jeu de course de Formule 1 sous sa licence. Ils étaient également conscients de notre situation financière, et leur directeur était particulièrement rusé.

Lorsqu'ils ont pris connaissance de notre situation financière, nous avons commencé à collaborer sur un projet. Nous avons travaillé ensemble pendant plusieurs mois, et lorsque la question du contrat a été soulevée, ils nous ont proposé des conditions inacceptables. C'était comme s'ils cherchaient à profiter de notre vulnérabilité. J'ai estimé qu'il était temps de mettre fin à cette situation. Ils n'étaient pas satisfaits de ma décision, mais je ne pouvais tout simplement pas travailler avec des personnes en qui je n'avais pas confiance. Cela est inenvisageable pour moi. Il est important de noter que nous avions déjà travaillé ensemble pendant une période, probablement de huit à dix mois, sans contrat formel. C'est pourquoi nous étions surpris de ne pas avoir de contrat à ce stade. C'est à ce moment que nous avons décidé de nous tourner vers une autre entreprise, qui a saisi l'opportunité.

Quant à Cryo Interactive, Philippe Ulrich n'était déjà plus impliqué, et une autre personne avait pris les rênes, principalement en tant que financier. Cette personne a été surprise par notre décision, car elle ne s'y attendait pas. J'ai déclaré que je refusais de travailler avec des individus de cette nature, et par la suite, ils nous ont rappelés à la recherche d'une solution. Ils étaient engagés dans d'autres projets et devaient discuter de la situation avec Alain Prost et d'autres personnes. C'était une leçon pour eux, car si vous ne respectez pas les autres, vous ne pouvez pas vous attendre à être respecté en retour. Le contrat qu'ils nous avaient proposé était tout simplement inacceptable, semblable à un contrat de débutants. J'étais perplexe quant à leurs agissements. Ils semblaient parfaitement conscients de notre situation financière et semblaient chercher à en profiter. C'est pourquoi nous avons décidé de travailler avec une autre entreprise, qui s'est avérée être Microids, une société française.

Microids a également connu des difficultés par la suite, bien que je ne sois pas sûr si ce sont les mêmes personnes. J'étais en contact avec eux à un moment donné. À l'époque où nous travaillions ensemble, ils avaient des ambitions de cotation en bourse, mais cela a changé par la suite. Je ne pense pas que leur tentative ait été couronnée de succès. Pendant notre collaboration, ils étaient impliqués dans la création d'un jeu de course de voitures intitulé Warm Up, mais il n'avait pas de licence FIA en raison des coûts élevés associés à cette licence. Par conséquent, nous avons pu être beaucoup plus créatifs et nous amuser davantage, car nous n'étions pas soumis aux contraintes habituelles liées à ce genre de licence. C'était le projet où nous avons eu le plus de liberté. Nous avons même créé un mode arcade délirant en ajoutant des systèmes de turbo sur les freins.

Comment avez-vous vécu, humainement, cette épreuve ?

La situation était assez étrange. En réalité, nous avions du mal à y croire. C'est pourquoi, avec quelques collègues, nous avons pris des mesures. Nous avons créé Corélane et avons commencé à développer des jeux pour téléphones, en formant une petite équipe. Au départ, nous avions de plus grandes ambitions, notamment l'idée de reprendre Ski Park, un jeu qui avait été maltraité.

Nous avons réussi à le refaire en seulement dix mois, ce qui était une tâche complexe étant donné que c'était un domaine que nous n'avions jamais exploré auparavant, comme les jeux de tennis, par exemple. Le délai était très court, et nous aurions eu besoin d'un ou deux mois supplémentaires pour le finaliser correctement. Cependant, Microids ne nous a pas accordé ce temps supplémentaire, ce qui a finalement abouti à un résultat insatisfaisant.

Le problème résidait dans le fait que Microids souhaitait obtenir la propriété des sources du jeu, ce qui signifiait que nous n'avions plus aucun droit sur le projet, même s'ils n'avaient pas développé le jeu eux-mêmes, ce qui a nui à la qualité. À ce stade, nous avons décidé de reprendre le projet et de travailler de manière plus approfondie, en capitalisant sur la base que nous avions.

Malheureusement, Daniel Macré, qui était alors le responsable de l'entreprise, se sentait mal à l'aise dans cette situation. Microids a exercé des pressions pour obtenir la propriété des sources du jeu, limitant ainsi nos droits. En fin de compte, nous avons été contraints de nous orienter vers le développement de jeux pour téléphones, bien que, à cette époque, les smartphones n'existaient pas encore, et nous étions principalement sur des téléphones tels que les Nokia. Corélane s'est lancée dans la production de plusieurs jeux, mais nous avons eu du mal à les vendre efficacement. Quelques grands acteurs du marché avaient des relations privilégiées avec les opérateurs pour la distribution, tandis que nous n'avions pas accès à ce système. De plus, nous avons découvert que certains éditeurs devaient respecter des quotas de vente, mais ils passaient en douce des accords avec d'autres parties, compliquant davantage la situation.

Qu’avez-vous fait après l’aventure Lankhor ?

Après Lankhor, j'ai davantage été impliqué dans la gestion. J'ai occupé un poste de gestionnaire dans l'entreprise de mon frère, mais c'était principalement pour subvenir à mes besoins, cela ne m'intéressait pas vraiment. Ensuite, j'ai exploré d'autres domaines.

J'ai également participé à un projet intéressant avec un ancien collègue de Lankhor. Nous avons effectué des recherches sur la compression de lumière et d'autres sujets similaires, vraiment de la recherche pure. Nous avons travaillé sur cela pendant deux ou trois ans, de manière assez informelle.

Que devenez-vous aujourd’hui ?

Maintenant, je suis de retour dans le domaine de la musique. En fin de compte, la boucle est bouclée. Et en ce moment, je travaille sur une application mobile. En fait, je suis en train de réaliser ce que je désirais faire avant de me lancer dans l'industrie du jeu vidéo.

Nous remercions chaleureusement les intervenants de notre série qui font de Rest In Play une chronique si particulière. Merci à eux pour leurs réponses et leur temps offert. Retracer l’histoire de leurs studios ne serait pas aussi enrichissant sans eux.

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