Comme chaque semaine, Superpouvoir.com fait le point sur l'industrie des comic books face au COVID-19.

Une aide toujours aussi vive envers les libraires

Nous l'avions signalé, les auteurs s'étaient mobilisés sur les réseaux sociaux, entre le 15 et le 20 avril, pour organiser des enchères dont les bénéfices iront aux libraires en difficultés. Sous le mot-dièse #Creators4Comics, Frank Miller, Neil Gaiman, Mike Mignola, Scott Snyder, Greg Capullo, Tom King, Jason Aaron, Gail Simone, Jock, Damon Lindeloff, Robert Kirkman et consorts ont récolté pas moins de 430 000 $. De son côté, Jim Lee continue d'abattre les dessins et d'engranger des fonds, passant allègrement la barre des 500 000 $.

Daredevil par Alex Maleev pour #creators4comics

Toutes ces sommes seront reversés à la fondation BINC. Celle-ci continue en effet son intense activité de soutien. Au 1er mai, l'organisation avait déjà  distribué 165 025 $ à 147 propriétaires ou employés de comic-shops  au titres d'aides individuelles d'urgence. Les fonds de soutien aux commerces eux-mêmes devraient commencer à arriver mi-mai. La date limite de dépôt de dossier était le 27 avril et BINC annonce avoir reçu plus de 700 sollicitations.

Clayface par Greg Capullo pour #creators4comics

La solidarité est, en tout cas, partout et vient parfois des sources les plus improbables.  Ainsi, au Royaume-Uni, l'organisation de soutien aux libraires, Book Trade Charity, a reçu un important don de 250 000 £ venant... d'Amazon, l'ennemi juré des librairies physiques.

Diamond table sur le 20 mai pour un retour d'activité

Cette semaine a vu les débuts de la nouvelle distribution des comics DC par UCS et Lunar. Malgré quelques loupés d'inscriptions rapportés par certains magasins, les premiers colis – très bien emballés – sont arrivés dans les boutiques qui ont choisi de passer par les deux nouveaux distributeurs choisis par DC Comics. Malgré un environnement de méfiance , voire de franche hostilité, de la part des propriétaires de magasins. Pour le moment, pas de chiffres sur le nombre de librairies à avoir fait appel à ce modèle alternatif, difficile donc de dire si DC a réussi son pari.

De son côté, Diamond joue l'apaisement. Dans une conversation vidéo avec plusieurs détaillants, Steve Geppi, le fondateur et PDG du distributeur jusque-là exclusif du marché direct, a assuré DC Comics de son soutien renouvelé et précisé qu'un peu de concurrence ne lui faisait pas peur. Il a également tenu à rassurer sur la solidité financière de Diamond, qui a dû mettre en place un plan de paiement de ses fournisseurs. Il précise notamment qu'il a le soutien de sa banque : "Au cours des six derniers mois, nous sommes devenus client de J.P. Morgan Chase, la plus grande banque du pays et l'une des plus grandes banques du monde. Et je dois vous dire qu'ils ont été incroyables.(...) Vous pouvez demander à n'importe qui, c'est la première fois que Diamond est en retard d'une heure ou même d'une seconde. D'habitude, nous sommes une véritable horloge. Je pense que c'est pour cela que les éditeurs ont été si coopératifs. Nous avons été totalement transparents avec eux et ils ont compris qu'il s'agissait d'une situation inhabituelle. Diamond est bien établi financièrement et je l'ai toujours soutenu personnellement si besoin était... Nous sommes prêts, non seulement pour nous, mais aussi pour aider les détaillants qui vont avoir besoin de notre soutien." Il ajoute qu'entre les diverses aides obtenues, l'entreprise est plus que prête à atteindre son objectif de remise en route de son activité.

Steve Geppi, fondateur et PDG de Diamond Distributors

Un objectif que Diamond estime pouvoir dater au 20 mai. Le distributeur a ainsi fait parvenir la liste des comics disponibles pour ce jour-là. Confiant, le distributeur a annoncé que son fameux catalogue Previews serait également disponible à partir du 27 mai. Un catalogue double puisqu'il comprendra les produits de mai et de juin. Il semble en tout cas qu'après quelques semaines de flottement, le distributeur historique ait repris du poil de la bête. Il vient de signer pour la distribution exclusive des produits de trois éditeurs, dont Ablaze, qui publie les versions américaines des BDs Conan de Glénat, et AWA (Artists, Writers & Artisans), la boite fondée par deux anciens de Marvel, Bill Jemas et Alex Alonso. Qui plus est, elle réfléchirait à se lancer sur le marche de l'occasion, afin de permettre à certaines librairies de commander des back issues.

Couverture de The Resistance 01 (AWA). La série de J. Michael Straczynski et Mike Deodato Jr., sorti le mois du confinement, traite également d'une pandémie.

Marvel Comics reviendra le 27 mai

Marvel, de son côté,  a annoncé un retour de ses produits dans les bacs pour le mercredi 27 mai, avec un "calendrier de sortie raisonné" selon ses propres termes. Il est vrai que le 27, seuls cinq titres seront proposés : Amazing Spider-Man #43, Avengers #33, Marauders #10, Star Wars: Doctor Aphra #1 et Venom #25. Si il y aura des recueils chaque semaine, les fascicules paraîtront eux tous les quinze jours. Le 10 juin sortira donc Black Cat #11, Daredevil #20, Deadpool #5, Excalibur #10, Miles Morales : Spider-Man #17 et New Mutants #17. Un rythme de parution lent qui durera jusqu'au 15 juillet, mais qui va permettre d'attendre que tous les comic-shops du pays puissent rouvrir et soit tous au même niveau pour pouvoir accueillir les plus gros titres comme X-Men, Captain America, Fantastic Four, Wolverine, Spider-Woman, Conan the Barbarian ou encore Star Wars.

Couverture de Marauders #10 par Russell Dauterman (Marvel Comics).

Autre éditeur à ménager les librairies spécialisées, Boom ! Studios leur propose tout un arsenal de propositions pour les accompagner lors de leurs réouvertures. Des couvertures alternatives offertes ou encore des rabais supplémentaires sur les recueils, les romans graphiques et les titres les plus populaires de l'éditeur comme All My Friends Are Ghosts et Something is Killing the Children font parti des outils offerts par Boom ! pour soutenir le marché direct. 

Couverture de Something is Killing the Children par Werther Dell'Edera (Boom ! Studios)

Les ventes de mars 2020

Diamond a aussi dévoilé les chiffres de vente du mois de mars 2020. Il s'agit du premier mois des politiques de confinement, mais il ne s'agit pas cependant de chiffres de ventes effectives, mais des commandes faites à Diamond les semaines précédentes. Tout au plus peut-on noter une légère baisse sur les commandes de la dernière semaine de mars et moins de réassorts. Quasiment pas d'effet COVID-19 donc. Les magasins spécialisés ont commandé pour 37 millions de dollars de produits à Diamond, à peu près la même somme que le mois précédent. Si le mois de mars 2020 est moins performant de 14.9 % que celui de 2019, il faut surtout y voir l'absence de la grosse locomotive que fut Detective Comics #1000. En fait, la surprise n'est pas tant dans les chiffres que dans la première place du classement. Si Batman, X-Men, Thor ou Wolverine sont des habitués du Top 10, si l'apparition du numéro 1 de Strange Academy ou du numéro 750 de Flash en haut du tableau n'est pas une surprise, le grand gagnant du mois est le numéro 1 de Spider-Woman, une série de Karla Pacheco et Père Pérez que l'on n'attendait pas forcément. Une situation qui fait penser à l'excellent score de Black Cat en juin dernier. Des performances artificielles provoquées par l'existence de très nombreuses couvertures alternatives qui attisent la convoitise des collectionneurs, ce que savent bien les détaillants.

Couverture de Spider-Woman #1 par Junggeun Yoon (Marvel Comics).

Autour des auteurs

Bien évidemment, alors que Diamond avait fermé ses portes, les ventes d'avril seront nulles et non avenues. Sans comic books à vendre, l'industrie s'est mise au ralenti. Comme nous l'avons déjà stipulé, beaucoup de projets ont été mis en pause, mettant des artistes en congés forcés. Carol Zara, co-créatrice du comic book Alien Toilet Monsters, a mis en place un fichier public afin que les professionnels sans emploi se fassent connaître. Parmi eux, on peut compter le français JL Mast ou encore Melissa Gifford qu'Image Comics a dû mettre en congé. Tous les éditeurs n'ont pas, comme chez DC Comics, une Marie Javins, responsable éditoriale des nouvelles initiatives de publication, qui a pu faire travailler de nombreux artistes – dont certains grands noms – sur des histoires courtes afin de les garder occupés.

Il n'y a hélas pas que le chômage qui menace les professionnels. Le coronavirus les touche également. L'éditeur Joseph Illidge (Heavy Metal) a raconté son expérience de malade confiné et l'artiste Bob Burden, créateur de Flaming Carrot et Mystery Men, a également été très malade. Il va mieux bien heureusement.

Bob Burden, quelques jours avant de tomber malade (Bob Burden/Facebook).

Un Free Comic Book Day alternatif

Ce samedi 2 mai aurait dû voir se dérouler le Free Comic Book Day, grande manifestation servant à promouvoir les comic books et les boutiques spécialisées. Bien évidemment repoussé (Steve Geppi et Joe Field tablent pour une organisation durant l'automne),  le FCBD reste un événement d'importance et certains ont tenu à marquer le coup. Parmi les nombreuses initiatives mises en place par des libraires (enchères en ligne, offre de comics gratuits), on peut noter celle de Russell Nohelty, qui a organisé durant tout le week-end, un Alt-Free Comic Day(s), un FCBD alternatif où la plate-forme Kickstarter a pu promouvoir les projets BDs financés par elle et où des auteurs comme Marv Wolfman, Jimmy Palmiotti, Barbara Kesel, Fabrice Sapolsky ou Matt Hawkins ont tenu des conférences vidéos.

En ces temps de confinement,  la conférence vidéo est d'ailleurs devenu un outil particulièrement utilisé. Les créateurs du podcast The Creator's Corner ont d'ailleurs organisé ce même week-end, une convention virtuelle intitulée Comic Conline où les fans ont pu voir, de chez eux, Patrick Gleason, John Romita Jr, Leinil Francis Yu, JonBoy Meyers ou encore Sean Gordon Murphy.

Une pratique qui se généralise, notamment dans le domaine de la littérature, permettant à des librairies d'organiser des événements autour des auteurs et de se rappeler au bon souvenirs des lecteurs. Malheureusement, selon Publishers  Weekly, si ces "rencontres" virtuelles attirent un public plus nombreux que les traditionnelles séancse de dédicaces en librairies, elle ne convertissent que peu à l'achat de livres. Reste, bien évidemment, le plaisir d'avoir pu échanger avec son auteur ou son artiste préféré. En ces temps d'isolement social, il y a de pire compagnie.

 

A suivre: Situation extrême et mouvement numérique inattendu de Marvel Comics

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