Alors qu'il ne bénéficie pas de la visibilité d'un Superman, Batman ou Wonder Woman, le film Blue Beetle vient de sortir dans les salles de cinéma françaises et doit faire ses preuves. Mais alors que le genre super-héroïque semble souffrir d'un désaveu grandissant de la part de ses fans, ce super-héros basé sur les comics de DC et plutôt méconnu du grand public n'a pas à souffrir de la comparaison avec de précédentes adaptations audiovisuelles.
De fait, on est en droit d'espérer que Blue Beetle tire son épingle du jeu et apporte un vent de fraîcheur à un genre qui pourrait en avoir bien besoin. Et il se pourrait que ce soit effectivement le cas.
Si le film d'Angel Manuel Soto ne révolutionne rien en suivant une structure assez classique, il a ce qu'il faut pour se démarquer en trouvant un équilibre entre une recette qui a déjà fait ses preuves et quelques nouveautés ou approches appréciables.
Blue Beetle nous raconte les débuts d'un nouveau super-héros. Si la partie origin story est inévitable, elle est assez rapidement amenée et les enjeux et motivations de chacun sont très rapidement posés. De plus, il est en réalité ici question d'une double origine dans la mesure où le super-héros Blue Beetle est en fait la somme d'un hôte (Jaime Reyes) et d'un "scarabée" dont l'histoire nous est racontée en grande partie dans le générique du début et complétée par petites touches au cours du film. Cela laisse donc davantage de place au développement du personnage principal qui, il faut le reconnaître, reste assez classique et pourrait être comparé à un autre super-héros qui, de son côté, est très bien connu du grand public.
En effet, Jaime Reyes (Xolo Maridueña), le jeune homme dans l'armure de Blue Beetle, n'est pas sans rappeler un petit gars sympa du Queens qui a été mordu par une araignée radioactive. Si Reyes et Peter Parker (alias Spider-Man) peuvent être facilement comparés l'un à l'autre, ayant donc de nombreux points communs, le premier profite en prime d'une culture et d'origines qui apportent un petit plus non négligeable à l'histoire. Car c'est une des forces du film : la culture hispano-américaine de Jaime est parfaitement bien amenée dans le film et nourrit l'histoire et ses personnages. Si elle est pour ainsi dire omniprésente, elle est malgré tout suffisamment bien dosée pour que l'aventure ne donne pas l'impression d'être le vecteur d'un message social. S'il est effectivement présent, il n'en devient pas le cœur de l'histoire.
La famille, le carburant de Blue Beetle
Non, le cœur de l'histoire, c'est la famille. Sans tomber dans les excès et en jouant sur certains stéréotypes des familles latines, le film nous plonge dans le quotidien des Reyes qui tentent de survivre dans un monde où les puissants qui les ignorent leur rendent la vie chaque jour plus compliquée. Toutefois, Blue Beetle n'est donc pas là pour nous raconter cette histoire mais nous rappelle en revanche l'importance de la famille et du cœur. Un message qui pourrait sembler assez cliché mais qui est finalement bien dosé et justifié.
Pour ce qui est de la famille Reyes, chaque membre a sa place et son rôle à jouer par rapport au héros. Et si l'oncle Rudy (George Lopez) pourrait sembler omniprésent et joue souvent le rôle d'élément comique de l'histoire, la combinaison de ces différents personnages et personnalités amène de l'équilibre dans le tout.
Un film accessible à tous
Si la structure du film est donc plutôt classique, la réalisation est efficace, même si le film n'offre pas forcément de séquences, ou même simplement de plans, qui révolutionnent le genre et laisseraient un souvenir impérissable dans l'esprit des spectateurs. En revanche, l'ensemble permet de passer deux heures agréables à suivre. Visuellement, sans être remarquable, l'esthétique du film est assez soignée grâce à des effets spéciaux réussis, le super-héros et ses antagonistes ayant un rendu à l'écran qui ne jure en rien.
Blue Beetle est un film tout public et, là encore, équilibré. Le nombre de morts n'est pas énorme mais la plupart sont visibles à l'écran sans que cela ne se fasse dans une débauche de sang, qui est lui-même également assez peu visible au final. Le jeune public devrait pouvoir voir le film sans trop de soucis et les plus grands apprécieront les allusions qui rappellent que Jaime est un jeune homme de 22 ans avec tout ce qui va avec (on pensera à son absence de souvenirs d'une partie de la soirée de ses 21 ans ou même les deux allusions à un "afflux sanguin dans son bas-ventre") permettant, de fait, d'insister subtilement sur le fait qu'il a peut-être beaucoup de choses à gérer pour quelqu'un de son âge, qui pourrait avoir d'autres préoccupations en tête que d'assurer le soutien financier de sa famille et, accessoirement, sauver le monde, même si ce n'est pas ici directement l'objet de son combat.
Le DC Universe, oui, mais lequel ?
Il est également intéressant de voir comment le film a été intégré dans le DC Universe. En effet, il a été produit avant que l'ère DC Studios de James Gunn et Peter Safran n'ait débuté. Et si l'univers cinématographique de DC repart de zéro, avec de nouveaux Superman et Batman – qui feront respectivement leurs débuts dans Superman: Legacy et The Brave and The Bold – Blue Beetle pourrait aussi bien s'intégrer à l'ancien univers qu'au nouveau.
Si le film pourrait parfaitement exister seul dans son coin, deux échanges permettent de préciser que Superman, Flash et Batman sont bel et bien présents dans le monde de ce nouveau super-héros. De quoi le légitimer auprès du public qui ignorait, pour la grande majorité, jusqu'à son existence il y a encore peu, tout en lui laissant suffisamment de place pour évoluer dans son coin. De quoi facilement amener ce personnage, créé sous un autre régime, dans le DCU en cours de développement, permettant à James Gunn d'officialiser que Blue Beetle fait bien partie de ce nouvel univers. Une chance donc pour ce super-héros qui a du potentiel pour susciter un certain attachement auprès du public qui pourrait, pourquoi pas, espérer voir un jour un Blue Beetle 2 être produit.
En définitive, Blue Beetle n'est pas parfait, loin de là, mais si un adjectif devait le décrire, ce serait peut-être "équilibré". Les deux heures de films ne donnent pas l'impression que son développement ait été alimenté par des ambitions trop hautes, voulant en faire le plus grand des films de super-héros. Ici, pas de surenchère, pas d'excès, juste ce qu'il faut avec de légers plus qui lui permettent à la fois de se démarquer légèrement tout en correspondant aux standards et attentes du genre super-héroïque au cinéma.