Ce n'est un secret pour personne : Marvel Studios a du mal à se relancer depuis Avengers: Endgame et enchaîne quelques déceptions critiques et publiques depuis plusieurs mois. Avec son univers partagé, la filiale de Disney avait pourtant réussi un tour de force raflant tout sur son passage, générant de l'impatience chez les fans de découvrir les nouvelles aventures de leurs héros et imposant son idéologie comme un modèle à suivre chez les studios concurrents.
Dans une période bien moins faste où la "fatigue des super-héros" gagne du terrain, comment Marvel doit se réinventer pour redresser la barre ? D'après The Hollywood Reporter, le travail commence d'abord en interne. Dans son numéro du 21 février, le célèbre média américain détaille comment Marvel ne compte pas abandonner son univers cinématographique, d'abord en se réorganisant mais surtout en reposant les bases.
Reculer pour mieux s'envoler
Après les échecs commerciaux de Ant-Man et la Guêpe : Quantumania ou plus récemment The Marvels – qui a réalisé le plus mauvais résultat au box-office avec 204 millions de recettes –, on peut dire que la Maison des Idées a connu des jours meilleurs et se retrouve dans une situation qu'elle n'avait jamais vraiment eu à gérer par le passé. Mais ce mois de février a de quoi redonner de l'espoir, même face aux critiques les plus virulentes, avec une année 2024 plus calme mais pas dénuée d'importance.
Tout d'abord, nous avons pu découvrir la première bande-annonce de Deadpool & Wolverine lors du Super Bowl. Celle-ci est devenue la plus vue au monde en moins de 24 heures avec 365 millions de visionnages (dont 123 venant des téléspectateurs du match). Pour la Saint-Valentin, le casting des Quatre Fantastiques – Pedro Pascal, Vanessa Kirby, Ebon-Moss Bachrach et Joseph Quinn – a été dévoilé dans un style rétro. Enfin, une nouvelle bande-annonce, pour les plus nostalgiques d'entre nous, a été révélée avec la série animée X-Men '97, suite du dessin animé culte des années 90.
Si ces annonces ont pour but de convaincre le public, The Hollywood Reporter explique, nous le rappelons, que le gros du travail se fait en interne. Le scénariste Eric Pearson (Thor: Ragnarok, Black Widow) a été appelé en renfort sur le second reboot des Fantastic Four, probablement l'un des films les plus importants pour le futur du MCU alors que la première famille Marvel s'apprête à revenir pour la troisième fois au cinéma et doit mener aux futurs films Avengers. Autre renfort de poids : Joanna Calo, showrunner de la multi-primée série The Bear, doit apporter toute son expertise sur le scénario de Thunderbolts, film similaire à la Suicide Squad de la Distinguée Concurrence.
Nettoyer le désordre
Le studio va également devoir revoir ses plans concernant le futur grand méchant de son univers. Destiné à remplacer Thanos, Kang le Conquérant pourrait finalement n'être qu'un vilain lambda au sein d'une Phase 4 qui aura eu du mal. L'échec d'Ant-Man 3 ajouté aux condamnations judiciaires de Jonathan Majors, son interprète, ont contraint à un changement de cap. L'acteur a tout d'abord été remercié alors que son rôle pourrait être considérablement revu. Sa dernière apparition dans la seconde saison de Loki pourrait être finale, à moins qu'un nouveau casting – permis grâce au Multivers – vienne achever ce qui a été incorporé ici et là. Divers rapports révèlent également que The Kang Dynasty, cinquième volet des Avengers, devrait changer de nom afin de minimiser voire effacer la manne du vilain temporel.
Si tous ces changements peuvent aider le studio à se remettre la tête à l'endroit, il faudra convaincre le public. Comme nous l'avons vu, les annonces de ce mois ont eu l'effet escompté mais il faudra concrétiser. Avec seulement deux séries (Echo et Agatha: Darkhold Diaries) et un film (Deadpool 3) en 2024, on revient donc à l'année la plus calme de Marvel depuis presque 10 ans.
Réduire la voilure
Mais pour résoudre ses problèmes et retrouver le public, il convient de déterminer la source de ces déboires. L'arrivée de Disney+, sensée apporter une nouvelle diversité, n'a pas aidé le studio à se mettre dans de bonnes conditions. Produire des séries one-shot, qui peuvent être vues indépendamment du reste du MCU, en quantité suffisante pour alimenter le service de streaming durant toute l'année, a entaché leur qualité. Sans réels impacts, ces programmes n'ont pas vraiment tous trouvé leur place malgré quelques réussites.
Spécialisé dans les films à gros budget, Marvel Studios ne connaissait pas vraiment le domaine du petit écran et n'a certainement pas pris en compte les attentes des fans. Il faut l'avouer : nous avons été mal habitués avec des surprises, des rebondissements, des liens entre productions, des crossovers, etc. Ces attentes, aussi légitimes puissent-elles être, n'ont pas placé les séries Disney+ dans une situation confortable, d'autant plus que Marvel a voulu recréer le même modèle que ses films en production de quatre voire six heures : le héros découvre ses pouvoirs, échoue face au méchant puis sort vainqueur et grandi. Alors qu'en s'écartant légèrement du sujet, en se montrant moins conventionnel, le succès pourrait être à portée de main. Preuve en est avec Watchmen, The Boys ou Invincible qui, par leurs intrigues totalement différentes ont su attirer le public. Nous l'avons également vu avec Loki qui, sans réel méchant à affronter frontalement, s'en est bien sorti.
Gérer plusieurs projets, au cinéma et à la télévision, en augmentant la cadence n'a pas été une mince affaire pour Kevin Feige – le président de Marvel Studios –et ses équipes. Faire plus en divisant les ressources ou se concentrer sur un projet à la fois ? Le grand architecte du MCU avait visiblement fait un choix, probablement malgré lui, pour générer encore plus de profits, plus vite. C'est pourquoi, à son retour à la tête de Disney, Bob Iger n'a pas manqué d'épingler sa filiale en lui demandant de réduire ses ambitions et surtout son nombre de productions. Faire mieux, générer de l'attente, employer les ressources à bon escient. Voilà certainement le nouveau crédo de Marvel Studios.
Fatigue des super-héros ou attente décuplée ?
Mais peut-on sincèrement parler de "fatigue des super-héros" ? Les personnages représentent toujours une part importante du merchandising de Disney, notamment auprès des plus jeunes. Sur leur support de base, les comic books, ils doivent désormais faire face à la concurrence des manga et des comics indé avec des ventes insuffisantes. Mais les raisons peuvent être bien plus variées (scénarios redondants, coûts d'achat, un univers si vaste qu'il peut rebuter les novices, etc.) qu'une simple "fatigue des super-héros".
Comme nous vous le disions plus haut, a-t-on été mal habitués ? Aujourd'hui un film Marvel qui atteint difficilement les 500 millions au box-office est considéré comme décevant alors qu'Iron Man en 2008 avait fini sa course autour de ce résultat, faisant de lui un succès que peu de spécialistes remettaient en doute. La scène post-générique ne dévoile rien du prochain Avengers ? Et alors ? Aujourd'hui, on est déçu.
Enfin, lors de la sortie de Justice League en 2017, Kevin Feige avait été interrogé pour savoir si cette concurrence l'inquiétait. Il a répondu qu'il souhaitait le meilleur au film de Joss Whedon, non pas par courtoisie professionnelle, mais car s'il fonctionne, alors cela ne peut que servir la cause des super-héros en général et donc de Marvel. C'est du donnant-donnant. Désormais, l'échec du DCEU ou encore du Spider-Verse de Sony ont créé une spirale négative dans laquelle Marvel ne tire plus son épingle.
Marvel a donc besoin de reprendre ses bases, se re-concentrer sur ses talents et les fondamentaux de son succès, générer de l'attente. Mais pas que. Les prochaines échéances seront forcément importantes, à la fois pour la firme de Disney mais également pour DC Comics qui repense son univers sous la houlette de James Gunn et Peter Safran. L'avenir s'annonce radieux avec Deadpool & Wolverine, Superman: Legacy, Captain America: Brave New World, The Batman 2, Les Quatre Fantastiques, The Brave and the Bold. On ne peut que le souhaiter.
Source : The Hollywood Reporter
