Geiger est en soi un petit évènement puisqu’il s’agit, après des années de travail pour DC Comics, du premier titre indépendant de Geoff Johns et Gary Frank depuis plus de dix ans. Et en dépit de qualités qui lui ont permis de se retrouver en haut des ventes de comics, ce n’est pas véritablement une réussite.

(image : © Geoff Johns & Gary Frank)

Image recrute des stars

En toute honnêteté, le trio Geoff Johns/Gary Frank/Brad Anderson est un poids lourd du monde des comics. Les voir partir en creator-owned chez Image est en soi une petite révolution. On se doutait que le scénariste commençait à se sentir à l’étroit chez l’éditeur historique de Batman avec des titres connaissant de nombreux retards ou encore la fin de Dommsday Clock, mais c’est en tout cas une belle prise pour Image. De fait, la compagnie propose à Geoff Johns une véritable ligne de comics, avec prochainement un titre en collaboration avec Bryan Hitch. Cependant, pour une tête d’affiche, Geiger se révèle toutefois assez décevant. Le titre compte en effet de très nombreux défauts et manque surtout d’originalité. Après, il est bien évident que c’est très lisible pour un comic book, les auteurs sont loin d’être des manchots et même si c’est décevant, la qualité est forcément au rendez-vous. Mais moins qu’on l’espérait.

Pas très original

Pour la deux-cent-cinquantième fois en dix ans, nous avons encore une histoire située dans un monde post-apocalyptique. Une guerre nucléaire a eu lieu une vingtaine d’années plus tôt et a réduit les Etats-Unis à un désert radioactif dans lequel survivent plusieurs villes-états. On suit ici le destin de Geiger, un scientifique mourant d’un cancer lors de l’attaque et dont le traitement expérimental lui a permis de survivre aux radiations en le transformant en homme fluorescent et radioactif. Geiger n’a qu’un seul objectif, protéger le bunker dans lequel il a enfermé sa femme et sa fille avant l’explosion en attendant que les radiations soient tolérables. Et les ennemis sont nombreux, particulièrement le jeune roi de Las Vegas, qui veut absolument détruire Geiger. Lors de son aventure, le héros va rencontrer deux orphelins dont la quête va l’amener à découvrir de sombres informations sur l’état du monde. Vous l’aurez compris, ce n’est pas très original. On a l’impression d’avoir vu ce concept des dizaines de fois, la seule nouveauté étant donc ce personnage humain qui se transforme en Captain Atom radioactif dès qu’il enlève ses barres de métal de son corps. De plus, le récit est assez alambiqué.

(image : © Geoff Johns & Gary Frank)

Une lecture sympathique mais de grosses faiblesses

Ce qui surprend en premier, c’est la gestion de l’univers du personnage. C’est très peu défini. On a en gros la ville de Las Vegas et ses méchants, mais tout le reste est passé sous silence. On ne sait rien de ce qui se passe dans le monde, et très peu dans le pays. On pourrait se dire que c’est la volonté du scénariste, qui préfère se concentrer sur les personnages mais il n’en est rien. Car là encore c’est une déception. Le personnage de Geiger en dehors de son attachement pour sa famille n’est pas extraordinairement développé et les orphelins qu’il rencontre sont vraiment très génériques. Cela sent un peu le réchauffé. De la même manière, le méchant roi est très agaçant et ses réactions sont vraiment trop exagérées pour susciter la moindre peur ou sentiment d’angoisse chez le lecteur. C’est assez surprenant de la part de Geoff Johns, qui est un scénariste avec beaucoup de métier, mais on a l’impression qu’il se prend un peu les pieds dans le tapis en voulant artificiellement complexifier un scénario très simple. On en veut pour preuve la structure de l’histoire, très mal définie. Nous avons des aller-retours dans le temps, et ces derniers ne sont pas du tout explicités. Si bien que parfois, on se demande si l’on est dans un flashback ou dans le temps présent, notamment pour tout ce qui concerne les rencontres avec le roi de Vegas. Pour tout vous avouer, votre serviteur s'est même demandé à un moment si le recueil n’avait pas inversé deux épisodes, ce qui est toujours mauvais signe. De plus, Johns livre un moment complètement en décalage en nous révélant dès le milieu du récit le destin de la femme et de la fille de Geiger, ce qui enlève le seul attachement au personnage que l’on pouvait avoir. Johns est donc dans une petite forme, et bizarrement, Gary Frank est au diapason.

(image : © Geoff Johns & Gary Frank)

Un Gary Frank toujours bon, mais…

Gary Frank est un excellent dessinateur, voire l’un des tous meilleurs de sa génération. Et pourtant, il n’est pas vraiment au mieux dans cette histoire. Son dessin est assez sombre, un peu abrupt et peut-être qu'il lui manque un encreur qui pourrait donner un peu plus de rondeur à ses dessins. Ce n’était pas aussi accentué sur Doomsday Clock où il singeait un peu le style de Dave Gibbons, mais là c’est assez flagrant. De fait, certains éléments de l’intrigue, et notamment la page de fin ne sont pas clairs, parce que l’on a du mal à reconnaître les personnages. Pas parce qu’ils sont mal dessinés, mais parce qu’ils ne sont pas bien définis, et même Gary Frank n’arrive pas à compenser la faiblesse du récit. Après, cela reste un comics dans la moyenne, il y en a de bien pires, et le récit a assez plu aux lecteurs pour que Geiger se retrouve dans le top des meilleures ventes de comics aux États-Unis mois après mois. Il n'est donc pas dénué de qualités, mais au vu de la notoriété de ses auteurs, c’est assez décevant. Un numéro spécial est prévu ainsi qu’une suite à la série. On espère qu’elle saura redresser le cap.

Geiger #1 à #6, comics publié par Image Comics, disponible dès le 4 mars 2022 en VF chez Urban Comics.

Geiger, Image Comics

 

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