Afin de préparer dignement les fêtes qui s’approchent à grand pas, la rédaction de Superpouvoir vous propose son calendrier de l’avent comics. Chaque jour, une petite pépite, un coup de cœur, une œuvre injustement ignorée vous sera dévoilée pour, pourquoi pas, l’ajouter au pied du sapin et surtout, étoffer votre culture comics.

Et aujourd’hui, un retour dans les swinging eighties avec l’un des tout premiers travaux de Grant Morrison : ZENITH !

(image : © Rebellion A/S)

Le soleil, au Zénith

Il y a quelques années, Urban Comics a tenté de sortir des sentiers battus pour nous proposer Zenith. C’est l’une des toutes premières œuvres du scénariste écossais Grant Morrison, publiée dans la magazine anthologique 2000 AD, celui-là même qui publie toujours les aventures de Judge Dreed et qui a révélé au grand public les noms d’Alan Moore, Brian Bolland, Dave Gibbons et Peter Milligan. Ce volume reprend globalement les deux premiers arcs de la série, qui ont été publiés sous la forme d’une douzaine d’épisodes de dix pages, ce qui est le format habituel des histoires de 2000 AD.

Zenith est le seul super-héros qui vit encore sur terre, après la disparition de tous les autres. Sauf que, Zenith n’est pas vraiment un super-héros. C’est avant tout un égoïste, que seule la célébrité intéresse et qui utilise ses pouvoirs et sa notoriété pour draguer les filles et faire tout ce qui lui plait. Mais le destin est cruel. Le retour de personnages issus de son passé va engendrer une véritable prise de conscience chez notre héros, qui va alors devoir apprendre le sens de l’abnégation.

Léger mais prometteur

On s’en doute un peu, ce travail de jeunesse est assez classique. Grant Morrison est audacieux, mais apprend à faire ses gammes. Ce qui est assez amusant, c’est de constater que le scénariste tente une approche plutôt fun et légère, ce qu’il n’a plus vraiment l’habitude de faire aujourd’hui. Lui qui est un chantre des récit métaphysiques, il nous propose ici plutôt un récit ancré dans la réalité et cela ne lui va pas si mal ! Car pour un travail de jeunesse, on sent déjà poindre le talent du scénariste, que ce soit dans le prologue de l’histoire ou une uchronie plutôt bien maîtrisée.
Il y a quelques bonnes trouvailles, notamment dans l'agencement de l'histoire (le prologue du premier segment est vraiment superbement construit) et on sent déjà un scénariste qui maîtrise ce qu'il écrit. Bien évidemment, comme de coutume dans les publications britanniques de l’époque, Morrison livre une satire politique, avec notamment la création de Mandala, un super-héros psychédélique devenu ministre du gouvernement de Margaret Thatcher. La thèse est assez classique puisqu’il s’agit d’une variation sur le thème des effets pervers du pouvoir et de la corruption qu’il entraîne, mais c’est vraiment plaisant. On n’échappera pas non plus aux messages sur la cause animale puisque c’est l’une des marottes de l’auteur écossais.
Le premier segment est d’ailleurs meilleur que sa suite, car elle permet de développer les personnages secondaires en profondeur. Ce qui est bizarre, c’est que Grant Morrison fait des efforts de caractérisation sur tout le casting, sauf son héros principal, qui reste encore un peu superficiel. Il n’y a pas autant de cynisme que dans un X-Force/X-Statix de Peter Milligan, mais les idées sont là et elles sont bien présentes. La deuxième partie du récit est un peu chaotique, inférieure à la première, mais ravira les fans du scénariste qui propose ici des idées bizarroïdes.

Des dessins splendides

Mais la réelle valeur ajoutée de l’histoire, c’est la puissance des dessins de Steve Yeowell (Starman, Invisibles). Contrairement à ses dessins récents, le style du dessinateur est quasiment méconnaissable. Il ajoute des tonnes de détails à ses dessins, remplit ses planches de nombreuses références, et évolue en plus au fil des épisodes vers ce style épuré et un peu plus clair qu’on lui connaît aujourd’hui. Si Zenith n’est peut-être pas la meilleure bande dessinée de l’univers, elle propose toutefois au lecteur de découvrir non seulement un futur grand scénariste dans ses premières œuvres mais aussi un dessinateur injustement méconnu et qui mérite largement qu’on s’y attarde. Si l’on saupoudre d’un peu de critique politicienne so british, Zenith vous proposera un très agréable moment de lecture.

À regretter toutefois, l’absence d’un second volume qui n’est jamais venu. C’est dommage.

Zenith Tome 1 est paru en France chez Urban Comics en 2016. Il reprend les épisodes 535-550; 558-559 et 589-606 de la revue 2000 AD sortis en 1987.

(image : © Rebellion A/S, Urban Comics)

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