Dans la mesure où DC Comics et son Black Label ne proposent quasiment que des titres Batman, voici donc le nouveau projet random du mois : One Dark Knight. Et surprise, c’est le dessinateur star Jock (Losers, Detective Comics) qui s’occupe non seulement de la partie graphique mais du scénario. Une première donc qui pouvait intriguer. Malheureusement, l’artiste prouve encore une fois l’adage récurrent dans les comics « un excellent dessinateur fait rarement un bon scénariste » n’est jamais galvaudé.
Entrer dans la lumière
Batman et tous les services de Gotham sont en alerte ! Le vilain EMP, qui avait rasé la ville de Gotham quelques années plus tôt avec des rafales électromagnétiques et été à l’origine de nombreux morts ou blessés doit être transféré d’Arkham à Blackgate. Décision surprenante de Vasquez, la directrice du département carcéral de Gotham car le prisonnier est la cible de nombreuses factions. Ancien chef de gang, nous avons d’abord ses anciens camarades qui vont tenter de le récupérer mais aussi tous les membres des gangs ennemis qui vont essayer de le tuer. Et quoi de mieux qu’un transfert à haut renfort de publicité et un trajet rendu public pour arriver à ses fins ? Heureusement, Batman veille.
Il ne pourra toutefois pas faire grand-chose lorsque le convoi pénitentiaire sera abattu et que le vilain sera libéré, conduisant à une explosion de violence sans précédent. La mission de Batman est désormais claire : traverser tout Gotham à pied et affronter les gangs pour ramener EMP à Blackgate sans que celui-ci n’explose encore. Une mission qui ne sera pas de tout repos.
Dessiner n'est pas scénariser
C’est toujours le même problème lorsqu’un dessinateur de talent s’essaye au scénario : c’est au mieux médiocre. Certes il y a des exceptions (John Byrne, Keith Giffen, Jeff Lemire, Frank Miller, Walter Simonson, Brian Bendis) mais généralement, c’est un ratage. Ce n’est pas David Finch, Dale Keown, Tony Daniel ou Joe Madureira qui vont me contredire. Et si rien n’est catastrophique dans ce One Dark Knight, c’est quand même une lecture assez redondante, classique et sans grand moment épique que l’on nous propose.
Le premier problème réside dans l’installation de l’environnement. À la base, Jock nous propose des cartes de Gotham afin de nous montrer l’évolution des deux protagonistes d’Arkham à Blackgate. Cela aurait pu être un moyen de nous raconter en détail l’histoire de Gotham, ou tout du moins de faire de la ville un personnage à part entière. Il n’en est rien. Jock change son point de vue assez rapidement et sans grande transition vers des personnages qui ne fonctionnent pas. Notamment le méchant EMP, un jeune garçon qui semble avoir des pouvoirs identiques à ce dernier (mais qui cela peut-il bien être ?) et Vasquez.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que leurs intrigues sont totalement emberlificotées et assez inconsistantes. Notamment tout le passage sur Vasquez, dont le changement d’attitude est totalement artificiel. Les sentiments semblent surjoués et les décisions caricaturales. On voit venir les revirements de très loin et rien finalement ne permet de faire ressortir un peu l’histoire. Le manque de protagonistes est assez criant. Batman se bat uniquement contre des membres de gangs totalement génériques et même si leur nombre peut sembler impressionnant, cela manque clairement de suspense.
Et puis, le récit est long, très long. Près de 120 pages pour une histoire qui au mieux aurait pu faire une back-up de cinq ou dix pages il y a trente ans. Alors oui, cet étirement de l’intrigue et cette redondance de scènes permet au dessinateur de se faire plaisir, ce qui est le point fort de One Dark Knight.
Une partie graphique impeccable
Parce que ce qui fonctionne parfaitement, ce sont les dessins. Jock est un excellent dessinateur et le fait de produire son propre scénario lui permet de mettre en avant son sens du design sur des pages entières. Mais ce n’est pas une grande surprise, on savait que l’artiste excellait sur le personnage. Certaines scènes sont graphiquement très impressionnantes. Le combat de Batman sur le pont est parfaite.
Mais Jock n’est pas seulement qu’un illustrateur. Sa narration graphique fonctionne aussi plutôt bien, avec une mise en couleur faite pas ses soins qui réhausse la qualité de son travail. Vraiment, graphiquement il n’y a aucun souci. C’est très lisible et très joli.
De plus, le format assez grand d'Urban Comics fonctionne vraiment bien. En revanche, c’est réellement dommage de gâcher l’excellence du dessin par une histoire cousue de fil blanc où rien ne décolle. Dommage.
Batman One Dark Knight, un récit complet publié par Urban Comics en VF.