Dans les années 70, une vague de dessinateurs philippins menée par Tony De Zuniga et Alfredo Alcala purent faire carrière dans les comic books américains en y montrant tout leur talent. D'autres avaient suivis comme Rafael Kayanan ou Romeo Tanghal, mais la filière s'était peu à peu tarie au fil des ans. Grâce au travail de Whilce Portacio, et surtout de Gerry Alanguilan, tout un pan de la BD mondiale a été à nouveau accessible durant les années 90. Alanguilan nous a quitté récemment.

De son véritable nom Doroteo Gerardo N. Alanguilan, Jr., Gerry Alanguilan est né le 20 janvier 1968 à San Pablo, dans la province de Laguna, aux Philippines. Il fit des études d'architectes avant de s'orienter vers la bande dessinée sous le surnom de Komikero.

Il intégra d'abord le Cats Studio, dirigé par Billy Lim-it, qui produit des séries ouvertement copiées sur les titres Image. Il y croisera d'autres artistes en devenir comme Jay Anacleto et Leinil Francis Yu. Petite main à l‘encrage, il aura l'occasion de travailler sur des séries comme Aster et Harriers qui auront même l’opportunité de traverser le Pacifique pour être publié aux USA chez le petit éditeur Entity Comics. En parallèle, il commence à écrire et dessiner ses propres histoires, notamment Wasted (disponible intégralement en ligne).

Couverture de Wasted Final Edition par Gerry Alanguilan (Pulp Edition).

Dans la foulée de sa découverte de Nick Manabat, Whilce Portacio, dessinateur américain aux origines philippines, s’intéresse au vivier artistique que constitue le pays. En 1995, il crée le studio Balete 55 (du nom de la rue où est situé le local à Manille) et se met à recruter des artistes. Gerry deviendra très vite son directeur artistique, contribuant à imposer Leinil Francis Yu dans l'équipe. Cela permettra à Gerry de mettre un pied chez Wildstorm où il encrera le travail d'un autre ses compatriotes, Roy Allan Martinez sur des titres comme Wetworks, Hazard ou Grifter.

Après plusieurs années de travail, Portacio lance un nouveau label, Avalon Studios, qui lui permet de lancer plusieurs séries qui servent de véhicule à ses poulains (Hellcop pour Gilbert Monsanto, The Magic of Aria pour Jay Anacleto et Roy Martinez), mais aussi à lui-même puisqu'il lance la série Stone. À cette occasion, Alanguilan devient l'encreur de Portacio. Il le suivra sur Tales of Darkness et X-Force. Cependant, c'est surtout avec Leinil Francis Yu qu'il se fera une carrière d’encreur, épaulant l'artiste dans tous ces projets, de High Roads aux récents épisodes d'X-Men de Jonathan Hickman.

Alanguilan donnera même son nom au personnage principal de Stone, Gerry Alan. Couverture de Stone vol.2 #2 par Whilce Portacio et Gerry Alanguilan (Avalon Studios/Image Comics)

Outre cette activité d'encreur sur le marché américain, il poursuivit également tout un travail d'auteur complet, principalement pour le marché philippin, entre des adaptations BD de grands classiques de la littérature (« La saison du juge » de Bram Stoker, « Le chat noir » d'Edgar Alan Poe) et d’œuvres plus personnelles. Parmi celles-ci, on peut citer Johnny Balbona, Humanis Rex! ou Timawa. Il créé même sa structure, Komikero, ce qui lui permet de publier ses propres projets.

C'est Elmer qui vaudra à son travail personnel une reconnaissance internationale. Avec cette fable mettant en scène des gallinacés ayant accédé à la conscience et à la parole, Alanguilan parle de racisme et d’intolérance. Elmer se voit adapté en français chez l’éditeur Çà et Là (qui a publié un joli hommage sur son blog) et obtient le prix ACBD des critiques et le prix Ouest-France au Quai des Bulles 2011. La bande sera également publiée aux États-Unis par Slave Labor Graphics. Parmi les autres titres de Komikero, on peut également citer Where Bold Stars go to Die ou Crest Hut Butt Shop.

Couverture d'Elmer par Gerry Alanguilan (Çà et Là).

Outre ses productions, Gerry s'est également intéressé à l'histoire de la bd de son pays, au travers d’un musée, virtuel d'abord, puis physique, dans sa ville de San Pablo, qui permet de collecter le patrimoine artistique du pays.

Pour la petite histoire, Alanguilan connaîtra les effets d'un buzz mondial avec une vidéo comique intitulée « Hey Baby ».



Hey, Baby! (Original Upload) by Komikero

Hey, Baby! (Original Upload) by Komikero


Gerry Alanguilan souffrait depuis longtemps d’insuffisance rénale. La maladie l'aura finalement rattrapée, laissant derrière lui son épouse Illyn Florese. Il laisse également un héritage artistique énorme puisque son travail aura ouvert la voie à tout une nouvelle génération d’artistes philippins comme Mico Suayan, Stephen Segovia, Harvey Tolibao, Edgar Tadeo, Philip Tan, Carlo Pagulayan et Jerome Opeña.

Gerry Alanguilan était déjà apparu diminué cette année à la Komikon, festival BD philippin (Komikon).

Source : ActuaBD, Komikero, ABS-CBN

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